Comme cela semblait intéresser quelques uns d'entre vous, je vous propose un rapide tutoriel sur la prise en main du chronocomparateur bon marché Weishi 1000. Vous trouverez cet appareil un peu partout sur le net, par exemple sur la plateforme B2C chinoise bien connue, à un peu moins de 100 euros désormais. Si l’investissement ne se justifie peut-être pas lorsqu’on possède une montre ou deux, il est en revanche très adapté dès lors que l’on souhaite tester ou entretenir une collection.
Bien entendu ça n’est pas un appareil de mesure professionnel mais, l’entrée de gamme chez Witschi débutant à 3600 euros, le Weishi 1000 reste la seule alternative dédiée aux simples passionnés.
Tour de l’appareil
Commençons par le panneau arrière sur lequel vous trouverez trois prises : l’entrée microphone (DIN), l’entrée alimentation 12V (alim fournie) et un connecteur USB pour un étalonnage usine.
On en parlait récemment, il est peu probable qu’un utilisateur renvoie un jour son Weishi en Chine pour le faire recalibrer, mais admettons.
La face avant est tout aussi simple. L’écran LCD évidemment, ici en version monochrome à rétro-éclairage bleu. Deux boutons « haut » et « bas » dont on se servira pour la navigation à l’intérieur du menu, un bouton marche/arrêt et enfin un bouton permettant soit l’accès au menu, soit la mise en sourdine du haut-parleur.
Concernant l’affichage de la partie supérieure, le Weishi 1000 propose de gauche à droite :
- RATE (s/d) : dérive moyenne en secondes par jour.
- AMPLITUDE (°) : amplitude du balancier en degrés.
- BEAT ERROR (ms) : erreur de repère en millisecondes.
- PARAMETERS : rappel en alternance (toutes les 5s) de la fréquence (A/h) et de l’angle de levée (°).
Profitons-en pour rappeler les valeurs normalisées de ces paramètres :
- RATE : -4 < s/j < +6 aux normes COSC (mais varie selon l’exigence de chacun et l’âge du mouvement).
- AMPLITUDE : 270° à 310° excellent – 250° à 270° acceptable.
- BEAT ERROR : < 0,5 ms (on tolère un dépassement pour les mouvements anciens).
Passons désormais au stand sur lequel vous poserez la montre à tester. Là c’est bien simple, c’est une copie quasi conforme du stand Witschi ! Avec un poids à vide de 650 grammes et un pied massif, le stand ne risque pas de bouger à la moindre vibration. Il se compose d’une mâchoire à ressort autorisant la saisie de n’importe quelle taille de boîtiers mais aussi de mouvements nus, ainsi que d’un diapason métallique relié mécaniquement au micro qui est, lui, encapsulé dans le corps du stand. Cette configuration est idéale pour ne capter que le son de la montre et faire abstraction autant que possible des bruits parasites.
Ce stand est dit « COSC » car il autorise le réglage d’une montre dans les six positions possibles (le COSC ne teste que sur 5 positions). Cela dit, vous verrez à l’usage que bien régler votre montre simultanément sur seulement 3 positions, c’est déjà du sport.
Voici, pour rappel, les positions conventionnelles de réglage.
Au plat :
- CH (cadran vers le haut),
- FH (fond vers le haut).
Au pendu :
- 6H (six du cadran en haut),
- 3H (trois du cadran en haut),
- 9H (neuf du cadran en haut),
-12H (douze du cadran en haut).
Deux exemples de positionnement du stand :
On ne règle que sur 5 positions au maximum car la position 12H est inusitée pour une montre bracelet. Faites l’essai, à moins d’avoir un bras en caoutchouc ou une épaule sur vérin hydraulique, c’est compliqué.
Personnellement, j’essaie de faire mes réglages sur les 3 positions CH, 6H et 9H. Si vous avez, par exemple, un métier qui vous impose d’avoir souvent le bras en l’air (comme écrire au tableau), il peut être intéressant d’intégrer plutôt la position 3H.
Paramétrage de l’appareil.
Voyons désormais le menu, une fois l’appareil mis en service.
On commence par régler le nombre d’alternances par heure (beat rate) du mouvement à tester. En mode « AUTO » le Weishi sait reconnaître seul 9 fréquences de battement différentes parmi lesquelles les plus communes : 18000, 19800, 21600, 28800 et 36000 A/h.
Si en revanche vous devez tester un mouton à cinq pattes (genre 12480 A/h), pas de souci, vous pourrez sélectionner manuellement la fréquence de votre choix parmi un peu plus de 50 présets.
Pour le second item, il va vous falloir renseigner l’angle de levée (lift angle) du mouvement à tester. Vous lirez souvent sur internet des gars qui vous diront de ne pas s’enquiquiner avec ça et de mettre toujours 52° (d’ailleurs par défaut, le Weishi est réglé à 52°). M’ouais enfin bon, ça ne coûte pas plus cher de bosser correctement.
S’il est vrai que les mouvements les plus courants ont un angle situé dans la fourchette 49-55 et que 52 est une valeur moyenne, ont trouve de tout dans une fourchette beaucoup plus large allant de 30 à 70°.
Ici par exemple, j’ai sélectionné 42° pour un Vostok 24XX.
Vous trouvez les angles de levée sur des sites dédiés comme celui-ci : https://watchguy.co.uk/cgi-bin/lift_angles
La saisie d’un mauvais angle engendrera une erreur de calcul de l’amplitude par l’algorithme de l’appareil. S’il s’agit d’un écart de quelques degrés l’incidence sera négligeable, au-delà de 10° ça peut commencer à chiffrer.
Le troisième paramètre concerne la périodicité de mesure de la dérive, à choisir parmi 7 présets (2, 4, 8, 12, 20, 30 ou 60 secondes). Cela signifie que toutes les X secondes, l’appareil va vous indiquer la dérive instantanée du mouvement (qui peut donc être différente de la dérive moyenne ramenée à 24h affichée en haut à gauche).
Il n’y a pas vraiment de règle, chacun fait selon son goût. Disons que plus la période est longue, plus cela gomme les brèves irrégularités de marche. De plus, chaque nouveau réglage de raquette sur une montre nécessite un petit délai pour que la marche se stabilise, il n’est donc pas forcément opportun de choisir une périodicité trop courte.
Personnellement, je positionne sur 12 à 30 secondes.
Enfin je passe sur le dernier chapitre du menu (« Language ») puisque sur ce bel appareil vous aurez le choix entre anglais et anglais. Vous me direz, c’est toujours mieux que seulement mandarin.
Des exemples.
La dernière partie du tuto n’a pas vocation à expliquer le réglage à la raquette d’une montre (tout le monde ici sait faire je pense) mais bien de voir ce qu’apporte concrètement le Weishi et l’interprétation que l’on peut faire de ses résultats au travers de quelques exemples.
On va donc très simplement prendre au hasard quelques montres dans les BAM, les tester uniquement au plat CH et voir ce qu’elles vont nous raconter.
Il est utile de rappeler que l’armage de la montre doit être complet avant le passage au banc, sans quoi les résultats d’amplitude ne reflèteront pas la réalité.
Exemple n°1
J’avais déjà posté ce premier exemple (Vostok 24XX) il y a quelques jours afin d’illuster qu’une bonne dérive journalière, seule, ne garantit en rien la qualité ou l’état d’un mouvement.
Ici nous avons un +1s/j qui pourrait sembler excellent. En réalité, grâce au Weishi, on constate surtout que l’amplitude est anormalement faible au plat et que le graphique indique une succession d’avances et de retards de manière cyclique. L’erreur de repère est un poil haute mais encore très acceptable pour un mouvement ayant plus de 30 ans sans entretien.
Inutile d’instruire davantage le dossier, très clairement lorsque vous voyez cela, c’est la certitude que votre montre a besoin d’une grosse révision.
Exemple n°2
Ici nous passons un autre vieux soviétique, un Raketa 2609 d’une trentaine d’années également.
La dérive est mauvaise, l’amplitude est très mauvaise et l’erreur de repère un peu grande, même pour du vintage. Cependant, à l’inverse de l’exemple précédent, on constate que la marche est plutôt régulière avec un retard constant.
Voilà qui nous indique qu’un réglage devrait nous permettre d’obtenir un bien meilleur résultat en attendant mieux (la révision complète).
Dans ce cas, il faudra commencer par ajuster le piton mobile. Notre erreur de repère devrait pouvoir descendre en dessous de 1 ms ce qui va vraisemblablement faire un peu augmenter l’amplitude.
Ensuite nous pourrons régler la dérive.
Exemple n°3
Troisième et dernier soviétique, à nouveau un Vostok 24XX mais beaucoup plus récent (donc russe plutôt).
L’amplitude est bonne, l’erreur de repère est nickel puisque nulle, et la dérive est acceptable.
Même si le graph ne représente pas une droite parfaite et que l’on peut soupçonner un usinage qui n’est pas à son optimum, on voit qu’un mouvement de l’est est capable de performances très honnêtes.
Exemple n°4
Passons à un ETA 2824-2 datant d’une vingtaine d’années mais probablement révisé au moins une fois. Dérive parfaite, bonne amplitude, erreur de repère tout à fait dans la norme, c’est vraiment pas mal.
Malgré tout, vous noterez des points régulièrement en dehors de leur ligne sur le graph du bas.
Cette petite anomalie pourrait être causée par une palette d’ancre sale par exemple.
Exemple n°5
Autre ETA, un 7750 Valjoux, 21 ans d’âge. Dérive nulle et grahique de marche quasiment parfait.
Voyez comme l’alignement des points est régulier, signe d’un mouvement en très bon état.
On constate toutefois que l’erreur de repère est un peu trop grande et l’amplitude dans la limite basse.
Dans un cas comme celui-ci, on ne touche surtout à rien, même si la tentation est grande de bidouiller le repère. Ce serait l’assurance de mettre le waï plus qu’autre chose dans ce mouvement qui tourne vraiment bien.
Exemple n°6
Ici nous avons affaire à un DG2813 fraîchement sorti des usines de Guangzhou.
La dérive est correcte, l’amplitude est bonne, l’erreur de repère est parfaite. Le graph est tout à fait régulier, on ne détecte pas d’anomalie majeure.
Mais c’est un mouvement neuf. Aura-t-il la même performance que les ETA vus précédemment dans 20 ans ?
Exemple n°7
Dernier exemple avec un Cattin C66 à échappement Roskopf qui, lui, date d’une bonne quarantaine d’années. Ce mouvement était très loin d’être un chef d’œuvre de l’horlogerie et ce n’est rien de le dire. Pourtant, à ma grande surprise, il a finalement de beaux restes.
La dérive est très acceptable pour du vintage, l’amplitude est bonne, le repère est bon.
Peut-être des rouages à nettoyer et une roue d’échappement à contrôler si on en croit les ondulations du graphique mais, dans l’ensemble, c’est vraiment pas mal.
Pour conclure, vous voyez quand même que ce petit Weishi 1000, pour environ 90 euros aujourd’hui , nous révèle pas mal d’informations sur nos tocantes.
Bien entendu, ici nous nous sommes contentés d’un test sur la seule position CH afin de voir rapidement quelques cas de figure. Lorsqu’on commence à se pencher sur les autres positions, on découvre alors beaucoup d’autres choses. Comme par exemple le balourd de balancier qui rend la montre inréglable entre le plat et les positions verticales.
C’est aussi à ce stade que l’on comprend deux choses. La première c’est qu’on ne règle pas bien une montre, on la règle le moins mal possible. La seconde c’est que la différence qu’il y a entre un mouvement de qualité et un qui l’est moins, n’est ni une vue de l’esprit ni une invention marketing.
À votre service si besoin d’un complément ou d’échange sur un point particulier.
.Maintenant j'aimerais voir un passage au contrôle d'une montre suivi de son réglage et re-contrôle pour me lancer dans l'achat de l'appareil .Possibeule 
