Salut les GN,
Pagani a plutôt le vent en poupe ces temps-ci, si l'on en juge au nombre de modèles qui déboulent sur les forums occidentaux. Une énième marque champignon qui pourrait connaître un succès aussi fulgurant qu'éphémère sur la planète horlogère ? Ou bien au contraire un nom susceptible de perdurer à l'instar de Parnis ? Aujourd'hui je vous propose de découvrir la PD-1651 , un pétillant cocktail qui réussit à assembler en une même montre un cadran Deep Sea, une couronne Yacht Master, un boîtier Submariner, e que s'apelerio Explorer !
Unboxing.
Passons rapidement là-dessus, c'est le minimum syndical. Il y a l'effort de la petite boîte en carton, d'une notice, d'une carte de garantie et d'une chamoisette siglée Pagani Design, voilà. C'est toujours mieux que la montre en vrac enrubannée dans du bullepack et du papier journal.
Cadran
Première excellente surprise sur cette montre bas de gamme. D'abord, tout est à sa place, les index appliqués ne le sont pas de travers comme parfois sur des montres bien plus chères (on ne citera pas de nom). Très bon point également pour la littérature, étonnamment cohérente pour une chinoiserie. Ici, pas de mentions ridicules annonçant une certification chronométrique, le ponpon en la matière revenant à Tevise avec son cocasse "Perlative Ceronometer" ! Non, ici, les mentions sont toutes justifiées : "Automatic", "Water Resistant" et "10BAR/100M". Mieux encore, cette littérature est agréablement équilibrée entre haut et bas de cadran, le tout surmonté d'un logo qui n'est pas sans rappeler le bouclier Tudor. À mon goût, l'ensemble est fort réussi.
Le seul bémol concernant le cadran est peut-être le soleillage dégradé noir/bleu façon Deep Sea que j'ai trouvé trop discret. Hormis en plein soleil, le cadran apparaît désespérément noir, c'est un peu dommage.
Verre
Eh bien là encore, la Pagani marque le point face à ses concurrentes chinoises. Non pas en raison de son verre saphir, qui est presque devenu un équipement standard, mais bel et bien en raison du cyclope qui est posé dessus. Certes, la loupe, peu d'amateurs l'apprécient. À tel point que certains s'empressent de l'ôter. Pour les autres (les vieux qui ne voient plus bien clair...) , quitte à en avoir une, autant qu'elle soit efficace ! Malheureusement, sur beaucoup de chinoiseries, le cyclope est juste décoratif tant le grossissement est minable. Ici, on ne plaisante pas, et je mets ma main à couper que le magnifier de cette Pagani est un x2.5 conformément à son illustre inspiratrice. Très très bien !
Boîtier
Pas de surprise, l'usinage du boîtier est conforme à ce qu'on est en droit d'attendre sur une chinoise à moins de 100 euros. Dessus brossé, bords polis, les arêtes ne sont pas trop vives, c'est globalement bien fait, il faut vraiment s'attarder sur les détails pour faire la différence avec un boîtier mieux fini. Comme par exemple l'arrière où le brossage est un peu brut de fonderie. L'ensemble est assez lourd pour donner un sentiment de qualité sans pour autant être inconfortable (146 g bracelet compris sur la balance).
La taille est parfaite et conforme à la suby originale : 40mm x 46mm x 13mm. À ce propos, bravo Pagani pour être revenu dans cette cale dimensionnelle puisque les précédentes submariner de la marque n'étaient disponibles qu'en 43mm.
Un regret : le fond transparent. Par Belenos ! Qu'on m'explique d'où vient cette foutue maladie de coller des fonds saphir sur tout et n'importe quoi ! Sur un beau mouvement c'est justifié, sur une déco chinoise, vis bleuies à la gouache et fintion Côtes de Shanghai, ça passe encore, mais alors sur un NH35 en boîte à biscuits... comprends pas. J'aurais largement préféré un fond plein type Rolex.
Finissons par la couronne vissée qui est siglée du logo Pagani en relief. Tout de même plus sympa qu'une vulgaire gravure laser comme on en voit hélas de plus en plus.
Lunette
Et là c'est le drame. La mouche dans le potage. La crotte sur le cake.
Alors que la montre s'avère jusqu'ici carrément enthousiasmante, la lunette est une catastrophe intergalactique. Le son des clics m'a rappelé les roues de la fortune qu'on trouvait sur les fêtes foraines de mon enfance : tic-i-tic-i-tic. Quant au jeu...aux jeux devrais-je dire. Il y a déjà le jeu dans le sens horaire, comme on en trouve assez régulièrement sur les montres bon marché. Mais mieux encore, ici nous avons même du jeu latéral ! Oui, oui, vous pouvez faire du hula hoop avec la lunette. Non, franchement, ça ne fait pas sérieux.
Je passerai sur le débat de la matière, la fiche technique annonçant une lunette céramique... mouais. Pour moi ça ressemble quand même bien à du plastique (surtout à 75 balles la montre) mais n'ayant pas l'expertise requise, on accordera le bénéfice du doute.
Bracelet
Je ne commenterai pas non plus le choix de finition : maillons extérieurs brossés à bord polis, maillons intérieurs polis, tout ceci n'est qu'affaire de goût. L'essentiel étant que cela soit plutôt bien fait et c'est le cas. Notamment les arêtes qui sont bien usinées et qui ne blessent pas le poignet, un soin du détail appréciable. Autre jolie surprise : les pièces de bout sont pleines. C'est assez rare sur une montre à ce prix pour être salué. De fait, il n'y a pas de bruit de quincaillerie, le bracelet est solidement arrimé au boîtier sans un poil de jeu. Ajoutons à ce beau tableau des maillons fixés par vis, assurant une mise à taille aisée et rapide. À ce propos, dès réception et comme il est vital de le faire sur toutes les montres ainsi équipées, surtout chinoises, je me suis employé à contrôler le serrage de toutes les vis. Ici, tout était parfaitement vissé d'usine, bravo.
Ce bracelet aurait pu être une totale réussite sans sa déployante d'un autre âge. Certes elle est plutôt jolie avec sa gravure "Pagani Design" mais sa manipulation est cauchemardesque. Il faut y aller de l'ongle pour déverrouiller le loquet de sécurité puis la boucle qui n'a pas de poussoirs latéraux. Si vous avez les bouts de doigts façon moignons, bonjour la crise...
Ça n'est pas rédhibitoire mais disons qu'il y avait, pour le coup, moyen de faire mieux même à ce prix. À noter pour finir la présence de micro-ajustements ainsi que d'une rallonge plongée.
Étanchéité
Vous avez sans doute remarqué que les marques chinoises ne prennent jamais de risque sur le niveau d'étanchéité de leurs montres. On se contente de vous annoncer du "water resistant", du 3ATM ou dans le meilleur des cas du 5ATM. Quand la notice n'indique pas en tout petit : "Wording on all watch dial is for decoration purpose only." (les mentions portées sur le cadran sont à titre de décoration uniquement).
Eh bien chez Pagani, on est couillu, on n'a pas peur. On annonce fièrement un 10BAR sur le cadran, sur le fond, sur le site, et ça n'est pas pour rigoler. Peu d'entre nous auront l'occasion de tester une Pagani à cette profondeur. En revanche, mes petits essais "maison" (trempage de 2h dans un seau et 2mn sous une douchette pression) se sont avérés satisfaisants : cette montre est donc apte à affronter la vie quotidienne avec pluie, douche et baignade, soit les attentes de 99% des individus qui vont l'acheter.
Luminescence
Là je dois avouer que c'est également une agréable surprise.
D'une part parce que les montres chinoises ne sont pas réputées pour leur luminescence. Elle y est souvent faiblarde, peu durable et mal tartinée. D'autre part parce que, selon les revues de la 1651 que l'on peut trouver sur le tube, beaucoup d'essayeurs trouvent que cette Pagani n'échappe pas à la règle.
Alors serais-je tombé sur un exemplaire particulièrement performant ? Pagani a-t-il revu sa copie entre deux batches de production ? Toujours est-il que si je livre mon propre constat et bien il est excellent !
Tout d'abord concernant la couleur, un magnifique bleu qui rappelle à merveille le Chromalight Rolex, un bleu plus soutenu que celui du Super Luminova BGW9.
Ensuite l'application est parfaite, il n'y a pas de zones sombres, pas de différence d'intensité entre aiguilles et index, c'est uniforme.
Enfin et surtout, ce lume est étonnamment durable ! Curieusement, à la charge il n'est pas extraordinaire d'intensité, mais en revanche il reste très présent jusqu'au petit matin. Je crois même que c'est la première fois que je constate cette "courbe de décharge" de la matière luminescente sur une montre : pas d'effet torche au départ mais un rayonnement qui faiblit très, très lentement durant 6 heures.
Mouvement
Terminons le tour du propriétaire par le mouvement, en l'occurrence un SII NH35A. Rien de follement excitant bien qu'à 75 euros la montre, on ne saurait se plaindre d'y trouver de l'ADN Seiko. Il donne accès bien entendu au remontage manuel (doux et agréable) ainsi qu'au stop seconde. Sorti en 2011, le NH35A n'est fondamentalement qu'une exécution un peu plus sommaire du 4R35 Seiko. C'est un "bon tracteur" selon l'expression consacrée, sans excès de zèle puisqu'on reste en 3 Hertz. La trotteuse est exempte d'à-coups, contrairement à ce qu'on peut observer par exemple sur certains DG28, et ça me va bien.
Durant le test, je n'ai eu que rarement besoin de recaler l'heure de cette 1651 ce qui, empiriquement, annonce une dérive minime. Vérifions cela au chronocomparateur sur cinq positions.
Position à plat :
Position 9h en bas :
Position 3h en bas :
Position 6h en bas :
Position 12h en bas :
Je précise n'avoir fait aucun réglage, ces résultats sont tels que sortis d'usine, après plusieurs jours de rôdage et un barillet remonté à bloc. Pour rappel, la doc technique Seiko Instruments Inc. annonce une plage de dérive allant de -20 à +40s/j.
On constate donc clairement que ce NH35A est plutôt dans la gamme 0/+10s/j ce qui est carrément excellent, notamment sur une montre qui, rappelons-le, est sous la barre des 100 euros !
Les amplitudes peuvent paraître faiblardes mais j'ai constaté, par expérience, que les calibres Seiko n'ont jamais d'aussi grandes amplitudes que les autres mouvements, qu'ils soient suisses ou soviétiques.
L'heure du bilan
Très sincèrement, s'il n'y avait pas cette histoire de lunette et, dans une moindre mesure, la déployante, je pense qu'on tenait la meilleure sublike actuellement sur le marché.
C'est vraiment dommage d'échouer pour ces détails bêtes qui auraient pu être facilement réglés.
Mais enfin soyons honnêtes, pour 75 euros nous avons un cadran réussi, un boîtier réussi et surtout de la taille idéale, un bracelet d'une qualité rarement vue dans cette gamme, une étanchéité à 10ATM réelle et enfin un mouvement d'origine Seiko dont la dérive frôle l'excellence. Faites le tour de la place, il n'y a, à l'heure actuelle, aucune autre alternative qui vous en offrira autant à ce tarif.
Au-delà de l'analyse purement technique je terminerai davantage par l'analyse du coeur. Et je dois avouer que depuis son arrivée, j'ai beaucoup porté cette Pagani, certes pour le test, mais non sans plaisir. C'est vraiment la montre sans prise de tête, que vous choisirez le matin parce que vous saurez qu'elle vous accompagnera efficacement, quoique vous ayez prévu dans votre journée, au bureau, sur un chantier ou à la plage. Assez curieusement, le mix que j'évoquais au début (Deep Sea/Yacht Master/Submariner/Explorer) qui pourrait sembler de prime abord n'être qu'un joyeux bordel, ou un bon moyen de passer la douane sans pilonnage, s'avère finalement à l'usage plutôt sympa. En effet, ce patchwork finit par gommer l'aspect hommage pur et dur et donner l'impression de porter une montre singulière. Globalement, good job Pagani !
et bravo pour le texte très explicite et franc du collier 
